Mettre l’expérience en mots. Les savoirs narratifs

Sous la direction de Martine Lani-Bayle. La chronique sociale, 2019

Préfacé par Gaston Pineau qui avait dirigé le colloque de Tours en 1986 sur les Histoires de vie, l’ouvrage dirigé par Martine Lani-Bayle, s’il ponctue une étape de la carrière de cette professeure émérite en Sciences de l’Education, ne met pas un point final à son engagement. En rassemblant les contributions de plus de trente chercheurs, de champs d’expériences, d’itinéraires et de cultures différentes, Martine Lani-Bayle permet de mettre en perspective une approche pluridisciplinaire dans une période où les métamorphoses de la transmission génèrent doutes et angoisses.

Au-delà de son expertise en Sciences de l’Education, on y sent la conviction de la praticienne en psychologie clinique qu’elle fut pendant 20 ans. Les contributions prennent appui sur des récits de vie individuels, comme sur des récits collectifs- trop peu, on peut le regretter-, qui sont à la fois un défi au temps et une certitude que la construction ou la reconstruction de soi peut emprunter des chemins de la mise en mots. 

Quand l’expérience individuelle se dit et s’écrit, elle nous renvoie à cette conviction formulée par Carl Rogers dans les années 1950 selon laquelle « le plus intime en chacun de nous est aussi le plus universel  ». En traversant tous les champs de l’existence humaine, le récit de vie quand il passe sous la formulation scientifique de « savoirs narratifs », contribue à structurer ce qui était à dire, ce qui était tu, et à l’inscrire dans une histoire collective qui le dépasse.

« Faire de sa vie, une histoire » comme le titrait en 1998, Alex Lainé dans le champ de la formation, c’est mettre l’individu au croisement du « processus d’hominisation et d’humanisation » selon une image d’Edgar Morin, tout au long du « dur travail d’exister ».

Chaque contribution ouvre des possibles, mais il me plaît que l’ouvrage s’achève sur celle de Zineb El Mannssouri et son récit des cierges de Salé qui traverse le temps, porteur d’une lumière qui refuse de s’éteindre, comme une métaphore de cet ouvrage.