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Les entreprises humanistes. Comment elles vont changer le monde

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Jacques Lecomte, mis en ligne le 15 mars 2016.

On peut se demander ce que vient faire un ouvrage dédié aux entreprises sur un site dédié à l’école. Il devient pourtant clair, à la lecture de ce livre de Jacques Lecomte que les finalités et les méthodes de l’éducation humanisante se retrouvent au sein des Entreprises humanistes (celles qui font confiance au potentiel positif de leurs ressortissants) comme de l’école bienveillante. Appuyée sur de très nombreuses études, la démonstration est faite de l’impact positif d’un parti-pris humaniste sur la vie interne et sur la responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise. Ces organisations sont par ailleurs très rentables. Cette démonstration plaide donc en même temps pour la généralisation d’une éducation humanisante.

« Ce livre est une contribution importante à l’humanisation du travail et au travail de l’humanisation. » EDGAR MORIN

« Ce livre va vous bousculer, vous réjouir et vous encourager à faire changer votre entreprise. » CHRISTOPHE ANDRÉ

« Après La Bonté humaine, Jacques Lecomte nous ouvre une nouvelle porte vers un monde meilleur. Un livre enthousiasmant à mettre entre toutes les mains. » MATTHIEU RICARD

« Clarté, probité et espérance : on retrouve dans ces pages les trois principales qualités de Jacques Lecomte. » JEAN-CLAUDE GUILLEBAUD

1e PARTIE : L’EPANOUISSEMENT DE LA PERSONNE AU TRAVAIL


1. Être heureux au travail

  •  Contrairement à une opinion commune, la grande majorité des personnes se disent heureuses au travail. Il n’y a pas de relation entre le niveau de rémunération et le bonheur au travail.
  •  C’est lorsque nous effectuons une tâche difficile et stimulante, tout en pensant avoir la capacité de la réaliser, que nous avons le plus de probabilité d’éprouver un sentiment d’accomplissement au travail.
  •  Nous ne fonctionnons pas tous de la même manière face au travail. Certains parviennent à trouver du sens à leur travail, quel qu’il soit ; d’autres, même avec un travail intéressant, ont beaucoup de difficultés à y trouver du sens.

2. Trouver sa vocation

  •  Nous pouvons considérer notre activité professionnelle de trois manières différentes. Soit comme un job (uniquement comme source de revenus), soit comme une carrière (source de revenus et moyen de promotion), soit comme une vocation (source d’un sentiment d’utilité sociale et d’accomplissement personnel).
  •  Toute activité professionnelle peut être vécue comme une vocation. Tout dépend du regard porté sur elle. On peut enrichir son travail pour en faire une vocation.

3. Être vraiment motivé

  •  Il existe deux formes de motivation : une personne est motivée intrinsèquement lorsqu’elle trouve de l’intérêt dans l’action en elle-même, tandis qu’elle est motivée extrinsèquement lorsque son intérêt concerne le résultat obtenu à la suite de l’action (salaire, primes, avantages divers). La motivation intrinsèque est plus profonde et plus durable.
  •  Ceci doit être nuancé par le fait que les avantages financiers peuvent stimuler la motivation intrinsèque. Tout dépend de l’intention que l’on attribue au supérieur hiérarchique qui les fournit : si l’on pense qu’il le fait par intérêt, cela diminue la motivation intrinsèque ; si l’on pense qu’il le fait dans une démarche sincère de reconnaissance, cela augmente la motivation intrinsèque.
  •  Nous éprouvons plus de motivation intrinsèque lorsque notre activité permet de satisfaire des besoins psychologiques fondamentaux, en particulier les besoins d’autonomie, de compétence et de relations humaines ; également de sens, d’utilité sociale, de cohérence avec des valeurs personnelles.

4. Se sentir utile aux autres

  •  L’altruisme est une composante majeure du bonheur et de la motivation au travail. Le sentiment d’être utile incite à faire son travail le mieux possible.
  •  Les cadres devraient créer des situations qui permettent à leurs collaborateurs de constater l’impact positif de leur travail sur ceux qui en bénéficient.
  •  L’empathie est une source importante de créativité professionnelle. Pour qu’une idée nouvelle soit vraiment créative, il est préférable qu’elle soit également utile ; et donc, que leur auteur s’efforce de se mettre à la place de l’utilisateur éventuel.
  •  La « motivation de service public » désigne le désir d’être professionnellement utile aux autres. Elle est particulièrement présente chez les fonctionnaires et les salariés du secteur associatif, mais peut être ressentie par toute personne, quelle que soit son activité.

5. Travaillons-nous pour l’argent ?

  •  Nous sommes généralement surtout motivés par le travail et son utilité sociale… tout en croyant que les autres sont surtout motivés par l’argent. Ceci a des effets particulièrement problématiques dans les relations entre cadres et collaborateurs.
  •  La plupart des personnes qui gagnent des sommes importantes à la loterie continuent leur activité professionnelle ou en profitent pour en exercer une autre. Ceux qui choisissent de s’arrêter de travailler sont généralement proches de la retraite.

6. Les primes à la performance nous motivent-elles ?

Le système de rémunération en fonction de la performance a généralement des effets inverses à ceux escomptés. Trois arguments, d’apparent bon sens, sont généralement avancés pour justifier des primes à la performance. Or, ils sont tous à l’origine d’effets indésirables.

  •  L’argument de justice : Il paraît légitime que le salarié soit récompensé en fonction de sa performance. Or, les salariés considèrent souvent comme arbitraires les critères ayant fondé la décision de leurs supérieurs. Par ailleurs, l’instauration de la prime à la performance crée des tensions au sein de l’équipe.
  •  L’argument de productivité : L’attrait d’une rémunération plus élevée est censé encourager le salarié à produire un effort supplémentaire. En fait, la prime à la performance n’augmente que rarement la quantité de travail fourni et diminue généralement sa qualité.
  •  L’argument de sélection : Les primes devraient inciter les salariés les plus productifs à venir travailler dans l’entreprise. En fait, le paiement à la performance séduit surtout les individus âpres au gain. Les personnes désireuses d’être utiles, que ce soit envers leurs collègues ou envers la société, seront attirées par des emplois servant le bien commun et par une ambiance de travail collaborative.

2e PARTIE : DES RELATIONS D’EQUIPE HARMONIEUSES


7. Vive la confiance !

  •  Ne pas contrôler la présence de jeunes stagiaires au cours d’une formation professionnelle multiplie par deux leur taux d’emploi.
  • Les salariés sont bien plus satisfaits et motivés au travail lorsqu’on leur fait confiance et qu’on leur accorde beaucoup de liberté que lorsqu’on les contrôle. Les entreprises où c’est le cas sont très rentables. Inversement, les divers systèmes de contrôle génèrent des coûts, notamment en termes de baisse de performance, voire de comportements tels que le vol.
  • La première question que devrait se poser un employeur qui envisage de faire confiance à ses salariés n’est pas de savoir si ses salariés sont honnêtes, mais si lui-même l’est.
  • La confiance est sincère ou elle n’est pas. Elle implique une conception de l’être humain comme étant honnête. Une « confiance » uniquement stratégique, dans un objectif de rentabilité, risque d’entraîner des effets contre-productifs, lesquels feront croire à tort que la confiance est inefficace.
  • Avoir confiance dans les idées des salariés est une clé de l’innovation. Le droit à l’erreur est indispensable pour cela.
  • La confiance porte sur deux aspects : la compétence d’autrui et son honnêteté. Lorsqu’un manager fait confiance à l’honnêteté d’un collaborateur pour accomplir une tâche, il doit par ailleurs s’assurer de la compétence de ce dernier et, si nécessaire, faciliter le développement de celle-ci, par exemple grâce à une formation.

8. Travailler en bonne collaboration

  • Les salariés coopératifs sont les plus performants. Il y a une spirale vertueuse entre coopération et performance.
  • Lorsqu’une organisation instaure une atmosphère de compétition entre les salariés, elle génère un mal-être et une diminution du partage d’informations, ce qui entraîne une baisse de la performance du groupe.
  • Une atmosphère de collaboration au sein des équipes médicales sauve des vies. Les médecins se trompent fréquemment sur ce que les autres personnels pensent du fonctionnement de l’équipe. Ils doivent donc s’efforcer de faciliter la communication chez ces derniers.
  • L’uniformité de pensée au sein d’un groupe peut engendrer des décisions catastrophiques. Il est bénéfique d’institutionnaliser un système de critique bienveillante des décisions collectives, par exemple sous forme d’« avocat du diable ».

9. Se mettre au service des autres

  • Plus un salarié est satisfait au travail, plus il a de probabilités de rendre service à ses collègues et à l’entreprise en général. Les cadres ont une forte influence sur la tendance de leurs collaborateurs à s’entraider ou non. Les attitudes qui ont le plus d’impact sont la capacité à entretenir une bonne relation personnelle avec les collaborateurs, un comportement exemplaire, le fait d’incarner une vision, de favoriser les objectifs collectifs et de soutenir ses collaborateurs.
  •  Les dirigeants qui font passer leur entreprise de la performance à l’excellence incarnent un mélange paradoxal d’humilité sur le plan relationnel et de forte volonté en termes de projet d’entreprise.
  •  Le « leadership serviteur » :
    — * augmente la satisfaction, le bien-être, la créativité et l’implication des salariés ;
    — * favorise la coopération et l’entraide dans l’organisation ;
    — * diminue le turn-over des salariés.

10. La bienveillance comme source de joie et d’efficacité

  •  La reconnaissance mutuelle et le sentiment de justice au sein d’une organisation favorisent à la fois l’implication, la satisfaction au travail et la performance.
  •  Avoir de la considération pour ses collaborateurs et préciser clairement leurs tâches sont des attitudes complémentaires bénéfiques pour ces derniers et pour l’entreprise.
  •  La démarche appréciative (appreciative inquiry) est une méthode reposant sur la prise en considération de ce qui fonctionne bien. Surtout utilisée dans les organisations, elle est également appliquée avec succès dans d’autres univers : la santé, la protection de l’environnement, les pays en développement.
  • Elle constitue une rupture avec les pratiques traditionnelles, en focalisant sur les points forts, et permet ainsi de découvrir des compétences insoupçonnées et des approches innovantes chez les collègues et collaborateurs. Elle libère la créativité et ouvre des pistes d’évaluation, difficiles à mettre à jour par une approche traditionnelle.

11. L’apaisement des conflits

  •  La médiation d’entreprise permet une résolution des conflits de type gagnant-gagnant plutôt que gagnant-perdant, en révélant l’humanité de chacun. C’est une démarche bien plus efficace et moins coûteuse que le procès ou la conciliation. Elle devrait donc être la première forme de résolution du conflit envisagée, contrairement à ce qui se passe habituellement.
  •  Le médiateur est responsable et garant du processus, il facilite la communication entre les parties. En revanche, il n’intervient pas sur les décisions, lesquelles relèvent exclusivement de la responsabilité des parties.
  • Le médiateur doit faire preuve de qualités humaines d’écoute et d’empathie. Il doit également respecter certaines règles déontologiques, telles que la neutralité, l’impartialité (ou plutôt la multipartialité) et la confidentialité.
  •  Le médiateur n’est pas nécessairement un expert du domaine sur lequel porte le conflit, ni un spécialiste du droit. Beaucoup de « médiations » échouent précisément parce qu’on fait appel à un spécialiste, mais qui n’est pas formé à la médiation. Ce qui a été vécu n’a alors souvent rien à voir avec une médiation ; c’est ici que réside généralement la cause de l’échec.
  •  Beaucoup de personnes croient que les émotions sont superflues, voire néfastes lors de la résolution d’un conflit. Or, les émotions sont acceptées, et même bienvenues en médiation, car elles permettent aux personnes de révéler leur besoins profonds. Ceci ne conduit cependant pas à de l’agressivité et de la haine, en raison du rôle régulateur assuré par le médiateur.

3e PARTIE : L’ENTREPRISE AU SERVICE DE LA SOCIETE


12. Une théorie révolutionnaire

  •  Le dialogue est plus efficace que la sanction pour améliorer la sécurité. Les inspecteurs d’hygiène et de sécurité au travail obtiennent plus de réductions des accidents de travail à travers une attitude coopérative plutôt qu’une approche rigide.
  •  La meilleure attitude de leur part consiste à équilibrer encouragements et critiques, lorsque celles-ci sont nécessaires, en adaptant la stratégie d’inspection au comportement observé dans l’entreprise.
  •  La « pyramide régulatrice » de John Braithwaite permet d’ajuster le comportement des inspecteurs à celui des responsables d’entreprise. Face à un dirigeant vertueux, le dialogue et la persuasion ; face à un calculateur égoïste, la dissuasion ; face à un individu irrationnel ou incompétent, l’interdiction d’exercer.
  • Les responsables de la sécurité au sein même de l’entreprise sont généralement plus aptes à découvrir l’origine de malfaçons, et donc à améliorer la situation. Ce qui n’élimine évidemment pas la nécessité de l’action des régulateurs de l’État.

13. Quand l’entreprise diminue la pauvreté dans le monde

  •  La philanthropie d’entreprise peut aider, voire sauver, des millions de vies. Elle est d’autant plus efficace qu’elle tient compte des acteurs locaux de la société civile.
  •  Les philanthropes souhaitent redonner à la société une part de ce qu’elle leur a offert. La plupart sont discrets dans leurs dons, ne cherchent pas à se faire remarquer, tout en éprouvant une intense satisfaction dans ces actes. Ils insistent sur leur désir de contribuer à l’émergence d’une société meilleure et plus juste, en insufflant du professionnalisme dans l’action généreuse.
  •  Chercher à s’enrichir grâce aux pauvres est une perspective très contestable. Pour qu’une stratégie d’entreprise visant les pauvres soit moralement acceptable, elle doit respecter au moins ces trois principes de base : le produit doit répondre à de vrais besoins (alimentation, eau potable, santé, énergie, etc.) ; la démarche doit faciliter l’autonomisation des populations concernées ; elle doit être respectueuse de l’environnement.
  • Le micro-crédit est efficace, sans pour autant entraîner de miracles. Il permet généralement aux personnes de fonder une entreprise ou d’acheter des biens durables importants, comme une bicyclette. En revanche, il n’aboutit que rarement à la naissance d’entreprises de taille conséquente.
  •  Reposant sur une double caractéristique - pas de perte, pas de profits - le social business vise à résoudre de graves problèmes humains tels que la faim, la privation de logement, la maladie, la pollution, l’analphabétisation. 
  •  Les entreprises du social-business diffèrent clairement de l’action humanitaire, car il s’agit d’entreprises au plein sens du terme. Elles se distinguent aussi des firmes classiques, car elles sont orientées vers une cause et non vers le profit ; c’est pourquoi elles ne distribuent pas de dividendes aux actionnaires. Le social business s’appuie donc sur la partie altruiste de la nature humaine.
  •  De plus en plus d’entreprises multinationales ont mis au point des partenariats à grande échelle avec des entrepreneurs sociaux de pays en développement. La France est à la pointe de l’engagement dans ce domaine, grâce à des entreprises telles que Danone, Schneider Electric, Essilor, Veolia, Lafarge.

14. L’économie sociale et solidaire

  •  L’économie sociale et solidaire regroupe les organisations privées ou publiques (coopératives, associations, mutuelles, fondations voire entreprises) qui s’efforcent de concilier activité économique et utilité sociale. Elles agissent dans des domaines très divers : soins de santé, éducation et formation, culture et loisirs, sport, environnement, aide à l’enfance et aux personnes âgées, etc. Ce secteur d’activité représente environ 10 % de l’emploi salarié en France.
  • Les coopératives se distinguent des entreprises classiques en particulier par le fait que les salariés en sont les actionnaires et par la décision démocratique (un personne = une voix). Les coopératives résistent mieux que les entreprises classiques en temps de crise.
  •  Mondragon, la plus vaste coopérative au monde, a été créée dans le pays basque espagnol en 1956. Ce groupe, très diversifié, emploie plus de 80 000 employés et a un chiffre d’affaires de 14 milliards d’euros.
  • L’entrepreneuriat social est une manière d’entreprendre qui place l’efficacité économique au service de l’intérêt général. De nombreuses expériences d’entrepreneuriat social se sont créées en France et dans le monde au cours des vingt dernières années. Pour assurer la pérennité d’expériences prometteuses, l’organisation Ashoka apporte son soutien aux entrepreneurs sociaux.

15. Comment réduire les risques de catastrophes

  •  Les problèmes de communication constituent une source majeure de grandes catastrophes. Les managers ont tendance à méconnaître le travail concret des opérateurs, lesquels usent d’un savoir-faire, de règles non formelles, de ficelles de métier particulièrement efficaces et économes. Ce savoir-faire est malheureusement souvent inconnu des dirigeants et des experts, et n’est pas intégré dans les doctrines de sûreté.
  •  Beaucoup de catastrophes étaient assez prévisibles, car elles étaient généralement précédées par toute une série d’incidents, liés à des dysfonctionnements organisationnels.
  • Les organisations très fiables présentent certaines caractéristiques, dont : l’effacement temporaire de la hiérarchie le débat contradictoire et la fonction d’avocat du diable la non-punition des erreurs.
  •  L’élément le plus déterminant – et peut-être le plus surprenant – des organisations à haute fiabilité est la valorisation de l’erreur, qui ne doit pas être confondue avec la faute. Ainsi, les responsables d’organisations à haute fiabilité ne considèrent pas les erreurs comme des fautes à éliminer, mais comme une source d’apprentissage. C’est en étudiant les erreurs que l’on permet de les éviter à l’avenir.
  •  La sanction pénale des erreurs constitue un obstacle à la sécurité, car « la punition est mère du silence », elle incite les opérateurs à ne pas parler de leurs erreurs, et donc empêche d’apprendre à partir d’elles. Dans l’aviation civile, les enquêtes sur un accident ont pour seul objectif la prévention de futurs accidents ou incidents ; elles ne visent nullement à la détermination des fautes ou des responsabilités. C’est un facteur essentiel qui fait que l’avion est aujourd’hui le mode de transport le plus sûr.

16. Les entreprises humanistes sont-elles rentables ?

  •  De nombreux chefs d’entreprise parviennent à associer harmonieusement leurs convictions morales et l’efficacité entrepreneuriale.
  • La plupart des études constatent que les entreprises socialement responsables sont généralement plus rentables que les autres. Il existe cependant des résultats allant dans le sens inverse. La raison est que la bonne réputation sociale et environnementale d’une entreprise met du temps à se construire. Les parties prenantes ont tendance à interpréter les actions présentes de l’entreprise en fonction des réalisations passées. Ainsi, le chef d’entreprise qui modifie positivement les pratiques de l’entreprise, mais dans une optique essentiellement utilitariste à court terme n’obtiendra certainement pas les résultats escomptés.
  •  Si un chef d’entreprise souhaite s’engager dans une démarche de responsabilité sociale et environnementale, il est important qu’il le fasse dans une démarche de conviction authentique, et non pour des raisons utilitaristes.

4e PARTIE : LES REPONSES AUX DEFIS ENVIRONNEMENTAUX


17. Sauver la planète, c’est possible !

  •  Les limites technologiques à la préservation de l’environnement n’en sont pas vraiment. Dès lors qu’existe une volonté politique et entrepreneuriale, des moyens financiers peuvent être engagés, la créativité humaine peut être sollicitée, et des solutions émergeront inévitablement. Par exemple, nous avons aujourd’hui les connaissances permettant de mener efficacement la lutte contre le changement climatique. Certaines entreprises le font déjà, avec de remarquables résultats, à la fois environnementaux et économiques.
  •  Dès lors, les convictions morales des patrons d’industrie jouent un rôle central. Or ils sont de plus en plus nombreux à être conscients de leur responsabilité vis-à-vis de la planète. Démarche bien différente évidemment de l’écoblanchiment (greenwashing), stratégie de communication s’efforçant de faire croire à tort en un engagement pro-environnemental de l’entreprise.
  •  Les patrons se comportent comme les autres salariés dans leurs réactions humaines : la confiance à leur égard et la coopération avec eux sont les attitudes les plus aptes à faire émerger la meilleure part d’eux-mêmes et à susciter un engagement humaniste de leur part.
  •  Les accords volontaires pro-environnementaux se développent de plus en plus. Ils sont plutôt efficaces, mais à condition de comporter une certaine rigueur, en particulier par la présence d’un système crédible de contrôle et d’évaluation.
  •  Longtemps ennemis, industriels et écologistes ont de plus en plus tendance à construire des partenariats gagnant-gagnant, que cela concerne la gestion des déchets, la protection de l’environnement et de la biodiversité, la fabrication de produits écologiques…
  •  S’engager en faveur de l’environnement est financièrement bénéfique pour l’entreprise, en raison de :
    — * la diminution des gaspillages ;
    — * une innovation accrue ;
    — * la bonne réputation de l’entreprise auprès des clients ;
    — * la confiance des investisseurs ;
    — * une plus grande motivation des salariés.

18. Les trois plus grands succès écologiques de l’industrie

Les trois plus grands succès environnementaux de l’industrie résultent d’une action énergique des entreprises, agissant en coopération – plutôt qu’en confrontation – avec les agences étatiques de l’environnement et les associations environnementales.

  •  Rocky Flats Cette usine d’armes nucléaires nord-américaine, qui a fonctionné de 1953 à 1989, était l’un des sites les plus pollués des États-Unis. La contamination radioactive était présente partout. Les experts estimaient qu’il faudrait entre soixante-dix et deux cents ans pour le décontaminer. Cela a été fait en dix ans. Le site est aujourd’hui une réserve de faune.
  • La vallée du Rhin C’est l’une des zones les plus industrialisées au monde. Presque 20 % de l’industrie chimique mondiale se trouve sur ses rives. Ce fleuve, qualifié de « plus gros égout du monde » dans les années 1980, est aujourd’hui le cours d’eau le plus propre d’Europe, dans lequel on peut se baigner sans risque sanitaire. Les doses de métaux lourds très toxiques y sont 10 000 à 20 000 fois plus faibles que les standards exigés pour la qualité de l’eau.
  • La couche d’ozone La signature du Protocole de Montréal en septembre 1987 a été le point de départ de la plus remarquable collaboration internationale en faveur de l’environnement, visant la restauration de la couche d’ozone. Les 191 parties impliquées dans le protocole ont réduit de 95 % leur consommation de substances néfastes pour la couche d’ozone. Ce protocole est aujourd’hui qualifié d’« accord international le plus significatif dans l’Histoire », d’« exploit monumental » ou encore d’« effort planétaire sans précédent ». Ce succès peut préfigurer ce que pourrait être la lutte contre le réchauffement climatique.

EPILOGUE : REPENSER LA RAISON D’ETRE DES ENTREPRISES


19. La lente agonie d’une magistrale erreur

  •  La thèse selon laquelle la finalité de l’entreprise est d’augmenter le profit des actionnaires a largement dominé la pensée managériale pendant des décennies. Elle est aujourd’hui de plus en plus contestée, y compris par des dirigeants d’entreprise.
  •  La pratique fréquente consistant à aligner la rémunération des patrons sur les résultats de l’entreprise conduit ceux-ci à prendre des risques excessifs. Contrairement à ce qui est attendu, plus un PDG est payé en stock-options, moins ses performances sont bonnes, et plus cela se répercute négativement sur les actionnaires.
  •  Il y a une différence radicale entre deux types d’actionnaires aux intérêts contradictoires. Les investisseurs à long terme désirent que l’entreprise investisse dans les compétences des employés, qu’elle développe de nouveaux produits, qu’elle entretienne de bonnes relations de travail avec les fournisseurs et qu’elle prenne soin des consommateurs. Inversement, les investisseurs à court terme ‒ en particulier les fonds spéculatifs (hedge funds) â€’, qui prévoient de ne garder leurs actions que quelques jours ou quelques mois, privilégient des stratégies telles que la diminution des coûts, le rachat d’actions, ou encore la vente d’actifs, voire de l’entreprise en entier.

20. Changer radicalement de perspective

  •  Il est temps de changer radicalement de perspective au sujet de la raison d’être des entreprises. Je propose donc cette définition : l’entreprise est une communauté de personnes agissant ensemble au service du bien commun. L’expression « bien commun » implique :
  •  un travail qui ait du sens pour la personne qui l’accomplit, ainsi que des conditions de travail satisfaisantes ;
  •  des relations honnêtes avec les fournisseurs ;
  • des produits ou des services de qualité pour le client ;
  •  un impact positif sur la société environnante (diminution du chômage et de la pauvreté, services rendus à la communauté) ;
  • le respect de l’environnement, voire son amélioration.
  •  Les entreprises familiales réussissent mieux, à tout point de vue, car elles intègrent habituellement une vision à long terme, reposent sur des relations personnalisées et fournissent le sentiment d’appartenance à une communauté.
  •  Les écoles de commerce, qui ont longtemps enseigné la thèse actionnariale de l’entreprise, pourraient être à la source de ce renouveau de conception de la finalité de l’entreprise en tant que communauté.
  •  Cette perspective pourrait s’inscrire dans une perspective de philosophie politique plus large, le convivialisme, qui repose sur une idée forte : il est possible de construire une société fondée sur la coopération plutôt que sur la compétition, sur l’interdépendance plutôt que sur l’individualisme, sur la confiance plutôt que sur le contrôle, sur le service d’autrui plutôt que sur la loi du plus fort.

Et pour finir : L’OPTIMISME,

LEVIER POUR CHANGER LE MONDE


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